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Suppression de la redevance audiovisuelle visuelle : quelles conséquences sur les médias

29 juin 2022 Expression libre
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Si la presse n'existait pas, il faudrait ne pas l'inventer. Cette sentence est signée Honoré de Balzac. Dans sa Monographie de la presse parisienne, il se livre à une critique féroce d'un journalisme obsédé par le profit. Une condamnation aux échos très contemporains à l'heure de l'OPA de Vivendi sur Lagardère, propriétaire d'Europe 1, et du projet de suppression de la redevance audiovisuelle visuelle. Quel modèle économique pour une presse véritablement indépendante ?

La décision d'Emmanuel Macron de supprimer la redevance suscite la controverse : elle représente en effet un financement pérenne indépendante des cycles politiques, mais est jugée nuisible au pouvoir d'achat des Français qui, d'après un sondage d'OpinionWay en 2018, sont 69% à la trouver injustifiée par rapport à l'offre des médias publics. Selon Julia Cagé, "on s'est aperçu que les quelques sondages qu'on avait sur cette question là étaient plutôt des sondages sur des petits échantillons, avec des questions mal posées (...) . En réalité, vous avez à peine 20 % des Français qui sont pour la suppression de la redevance et vous avez plus de 50 % des Français qui sont soit pour son maintien, soit encore plus majoritairement par son remplacement par une contribution progressive affectée".

(Le rapport de Julia Cagé sur la question est disponible ici : https://www.jean-jaures.org/publication/une-autre-redevance-est-possible-pour-un-financement-affecte-mais-plus-juste-de-laudiovisuel-publicc/)

Comment sauver les médias ?

La législation actuelle est encore trop faible et au détriment des journalistes qui sont contraints de rendre leur tablier. Le cas de Sciences et Vie est révélateur : pour Julia Cagé (Économiste, spécialiste de l’économie des médias), "racheté par Reworld Media, qui est un groupe qui considère qu'on peut faire de l'information sans journaliste, le magazine scientifique a vu ses journalistes remplacés par des producteurs de contenu, ce qui a contribué à la diffusion de mauvaises voire de fausses informations... ce qui a entraîné, à la suite d'un bras de fer, le départ de la grande majorité de la rédaction de Sciences et Vie."

Face à ces dysfonctionnements structurels, Julia Cagé et Benoît Huet (Avocat au barreau de Paris), ont des propositions concrètes pour garantir une meilleure protection aux médias : " il faut une gouvernance démocratique. Avec une moitié de salariés au conseil d'administration des médias, même si on n'arrive pas à démocratiser le capital au monde démocratise la gouvernance. Il faut un vote pour le choix du directeur de la rédaction par au moins 60 pour 100 des salariés. Puis il faut un investissement minimum qu'on a défini en pourcentage du chiffre d'affaires dans les salaires et dans la rédaction. Ça paraît extrêmement important ."

L'information menacée

La concentration des médias dans les mains de milliardaires est une menace à la fois pour la qualité d'information et pour l'indépendance des rédactions. L'exemple de CNews, chaîne du groupe Canal + contrôlée par Vincent Bolloré, est frappant tant elle devient davantage une chaîne d'opinion plutôt qu'une chaîne d'informations. Le secteur de presse et de l'audiovisuel n'est pas le seul touché : un pas supplémentaire a été franchi avec le rachat d'Hachette par Editis. Pour Julia Cagé, "vous avez un groupe qui est non seulement très fort dans l'édition, mais également du côté de la distribution. (...) Les conséquences sont beaucoup plus longues et malheureusement, elles risquent d'être négatives pour la richesse du débat intellectuel en France et deuxièmement, la qualité de notre démocratie."




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